Michel Zink, Le dit des ribauds de Grève
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Le texte
  Œuvres complètes de Rutebeuf, texte établi, traduit, annoté et présenté avec variantes par Michel Zink,
  M. Zink, 1990 : Paris, Garnier, vol. 1, p. 200.
   
  CI ENCOUMENCE LI DIZ DES RIBAUX DE GRÈVE[1] f. 44 v° 2
   
1 Ribaut, or estes vos a point :
2 Li aubre despoillent lor branches
3 Et vos n’aveiz de robe point,
4 Si en aureiz froit a voz hanches.
5 Queil vos fussent or li porpoint
6 Et li seurquot[2] forrei a manches !
7 Vos aleiz en été si joint,
8 Et en yver aleiz si cranche !
9 Vostre soleir n’ont mestier d’oint :
10 Vos faites de vos talons planches[3].
11 Les noires mouches vos ont point,
12 Or vos repoinderont les blanches[4].
   
  Explicit.
   
   
Manuscrits : C, f. 44 v°.
 
10. C planghes.
 

[1] La place de Grève, actuelle place de l’Hôtel de Ville, était le lieu de déchargement des marchandises transportées par eau. On venait y chercher de l’embauche. Les sans travail s’y réunissaient : ils « faisaient grève » (mais l’expression n’est attestée que depuis 1846). C’était aussi le lieu des réjouissances populaires (feu de la Saint-Jean) et celui des exécutions capitales. Dans le Roman de la Rose, Jean de Meun, à peu près à la même époque que Rutebeuf, évoque lui aussi les « ribauds » de la place de Grève, portant leurs sacs de charbon d’un cœur léger avant d’aller manger des tripes à Saint-Marcel, danser et dépenser à la taverne tout ce qu’ils ont gagné (v. 5018-5034). F.-B. fait toutefois observer que, dans le poème de Rutebeuf, la référence à la Grève ne se trouve que dans le titre. Le poème ne fait allusion qu’à la misère de ces « ribauds », et non à la débauche qu’implique l’emploi moderne du mot – s’il est encore employé. En ce sens la traduction de « gueux », qui est celle de Jean Dufournet, est judicieuse. Mais misère et débauche sont le plus souvent associées dans les emplois du mot au Moyen Age, elles le sont dans la poésie de Rutebeuf, particulièrement dans la peinture par la Griesche d’été des misérables joueurs et buveurs, elles le sont enfin dans la description que fait Jean de Meun des ribauds de Grève. On a donc cru pouvoir conserver le mot « ribaud » dans la traduction.

[2] Tunique de dessus, avec ou sans manches.

[3] Les planches désignent évidemment ici les semelles. Mais l’emploi du mot dans ce sens étant aussi inhabituel en ancien français qu’aujourd’hui, on n’a pas cru devoir, en le faisant disparaître de la traduction, supprimer l’effet de la métonymie.

[4] Cf. Griesche d’hiver v. 32-33.

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