J. Bastin & E. Faral, De monseigneur Anseau de l’Isle
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Le texte
  Œuvres complètes de Rutebeuf, J. Bastin & E. Faral, 1959-1960 : Paris, Picard, vol. 1, pp. 514-516.
   
  De monseigneur Anseau de l’Isle. fol. 306 v°
   
1 Iriez, a maudire la mort
2 Me voudrai des or més amordreamordre, K 62 : attacher — AB 203, amort, ind. pr. 3 : effrayer — A 31 amorde, subj. pr. 3 : happer — J 153, S’amordre, AF 2, me voudrai amordre, AT 204, 436, se vout amordre, inf. de amordre (soi), J 180 s’amort, AE S’en amort, ind. pr. 3 : S’appliquer, s’attacher — Y 74 S’amort, ind. pr. 3 : se mêle — AB 205 S’amort, AF 3 S’amort : S’acharne.,
3 Qui adés a mordre s’amort,
4 Qui adés ne fine de mordre ;
5 De jor en jor ça et la mort
6 Cels dont le siecle fet remordreremordre, AF 6, fet remordre — K 64, AC 32, AS 548, faire a r. : être répréhensible.[1] ;
7 Je di que si grant morsmors, s. m., W 2, Z 118, T 160 : morsure — AC 34, AF 7 : morceau. amort[2]
8 Que Valmondois a geté d’ordre.
   
9 Valmondois est de valor mondemonde, AC 22, AD 142, K 18 — pur, purs — AF 9 : debarrassée — AU 55 : dépourvu.[3] ;
10 Bien en est la valor mondeemondee, AF 10, p. p. de monder : enlevée par nettoyage.,
11 Quar la mort, qui les bons esmondeesmonde, AF 11, B 21, ind. pr. 3 de esmonder : élaguer, faire disparaître ; AF 12, esmondee, p. p. : élaguée.,
12 Par qui larguesce est esmondeeesmonde, AF 11, B 21, ind. pr. 3 de esmonder : élaguer, faire disparaître ; AF 12, esmondee, p. p. : élaguée.,
13 A or pris l’un des bons du monde.
14 Las ! com ci a male estondeeestondee, AF 14, (mot inconnu).[4] !
15 De France a osté une espondeesponde, s. f., AF 15 : appui, base, fondement. :
16 De cele part est afondeeafondee, AF 16, p. p. : renversée, enfoncée..
   
17 Avoec les sainz soit mise en selesele, AF 17. Lire celle.[5]
18 L’ame de mon seignor Ansel,
19 Car Diex qui ses amis enseleensele, AF 19, lire enceler : loger.
20 L’a trové et fin et feel.
21 Més la mort, qui les bons flaeleflael, s. m., AF 22 : fléau, affliction. flaele, AF 21, ind. pr. 3 de flaeler : flageller.,
22 A aporté felon flaelflael, s. m., AF 22 : fléau, affliction. flaele, AF 21, ind. pr. 3 de flaeler : flageller. ;
23 A l’Isle forsfors, adj. m., AD 96 : sévère — AF 23 : redoutable AF 24 : fort — Y 165 : cruelle — AE 226 : difficile — K 50 : mauvais. lettres saele[6] :
24 Osté en[7] a le fortfors, adj. m., AD 96 : sévère — AF 23 : redoutable AF 24 : fort — Y 165 : cruelle — AE 226 : difficile — K 50 : mauvais. seelsëel, AF 24, s. m. : sceau..
   
25 Je di Fortune est nonvoianznonvoianz, AF 25 : aveugle — M 67 : les Quinze-Vingts.,
26 Je di Fortune ne voit goute,
27 Ou en son sens est desvoianzdesvoie, B 60, ind. pr. 3 de desvoier (soi) : se détourner ; A 71 desvoiez, s. pl. : égarés ; AF 27, en son sens est desvoianz, p. prt : pert la raison..
28 Les uns atret, les autres bouteboute, L 91, AF 28, ind. pr. 3 de bouter : pousser. ;
29 Li povres hom, li mescheanz
30 Monte si haut chascuns le doute,
31 Li vaillanz hom devient noianz :
32 Issi va sa[8] maniere toute.
   
33 Tost est uns hom en sonson (en), AF 33 : au sommet de. la roe :
34 Chascuns le sert, chascuns l’oneure,
35 Chascuns l’aime, chascuns l’aroearoe, O 177, ind. pr. 3 de aroer : élever — 178 aroera, fut. 3 : faire tourner — AF 35, chascuns l’aroe, ind. pr. 3 de aroer : honorer (?). (Cf. l’hypothèse du T-L, I, 541 : lire aloer <allaudare ?). ;
36 Més ele torne en petit d’eure,
37 Que li servizserviz, AF 37, p. p. employé substantivement, m. s. nom. de servir : ceux qui étaient servis. chiet en la boe
38 Et li servant li corent seure
39 Nus n’atant a lever la poepoe (lever la), AF 39 : lever la griffe, pour écorcher ou abattre.[9] ;
40 En cort terme a non Chantepleure[10].
   
41 Toz jors deüst uns preudon vivre
42 Se mort eüst sens ne savoir ;
43 S’il fust mors, si deüst revivre :
44 Ice doit bien chascuns savoir.
45 Més mort[11] est plus fierefier, fiere, adj., Y 8 : fort ; 36 : sévère ; 46 : effroyable, terrible ; AS 213 : mauvais ; AF 45 : cruelle. que guivreguivre, s. f., AF 45, E 121, AV 38, AU 273 : vipère, comme symbole de méchanceté.
46 Et si plaine de nonsavoirnonsavoir, AH 43 : bêtise ; AF 46 : ignorance.
47 Que des bons le siecle delivre
48 Et aus mauvés lest vie avoir.
   
49 Qui remireremire, AF 49, ind. pr. 3 de remirer : se rappeler. la bele chace
50 Que fere soliiezsuet, seut, Y 129, E 145, ind. pr. 3 de soloir ; X 4, suelent, ind. pr. 6 ; U 68, D 21, soloit, imparf. 3 ; AF 50, soliiez, imparf. 5 : avoir l’habitude de. (Le présent, suivi d’un infinitif, est employé pour exprimer un passé.) jadis,
51 Les vos brachésbrachés, AF 51, chiens de chasse, braques. entrer en tracetrace, AF 51, s. f., entrer en t. : suivre la piste (en parlant des chiens de chasse) — X 1 70 : moyen, solution — AO 18 : voie, piste.,
52 Ça cinq, ça set, ça neuf, ça dis[12],
53 N’est nus qui[13] li cuers mal n’en face.
54 Se por ame nul bien ja disdis, AF 54, parf . 1 de dire.[14],
55 Dieu pri qu’il vous otroit sa grace
56 Et doinst a l’ame paradis.
   
  Amen.
   
  Explicit de monseigneur Anseau de l’Isle.
   
   
Manuscrits : A, fol. 306 v° ; B, fol. 66 r° ; C, fol. 15 v°.
Texte et graphie de A.
Titre : B De monseigneur encel de lille, C Ci encoumance de monseigneur Anceel de lisle — 6 B C. qui le siegle font r. — 7 B si gros, C si groz ; B m. amors — 8 B Vaumondoiz, C Vaumondois ; C geteir — 9 B Vaumondoiz, C Vaumondois — 10 B en mq. ; B valors, C valeurs — 11 BC mors — 12 C cui — 16 C effondee — 17 B celle, C cele — 18 B Ensiau, C Anciaul — 19 B anselle, C ancele — 20 B feau, C feaul — 22 B fleau, C fleaul — 23 B lile ; C fort ; B seele — 24 B seau, C seaul — 25 B fortume est nonveanz — 26 B fortume — 27 C en mq. ; B sen, C sanz — 28 B a. bontez (en marge, d’une autre main bote) — 29 C Hons — 31 C Li mauvais h. — 32 B Ensi, C Ainsi — 33-40 B mq. — 33 C hons ; som — 35 C aore — 37 C serviauz — 39 A N. ne tent au lever la p. — 41 C preudons — 42 BC mors ; B san, C sanz — 43 B fut m. il d. — 44 B chacun — 45 BC mors ; B huyvre, C wyvre — 48 BC au — 49 BC remembre — 50 B soliés — 51 B boichez — 52 B Sa .VI. ; C Sa .V. sa .VI. — 53 B m. ne f. — 54 A Ne — B Explicit de monseigneur Ancel de lille.
 

[1] « au sujet desquels elle fait que tout le monde (la) blâme » ou bien « au sujet desquels elle fait que le monde est dans la douleur ».

[2] a mort (A), amors (B), amort (C, en un seul mot semble-t-il). Il ne peut s’agir ni de morir (même pris transitivement) ni de mordre, dont le participe passé est mors (cf. AC 33), et non pas mort, exigé par la rime : il faut donc lire sans doute amort, présent ou parfait de amordre, « attaquer de la dent (un gros morceau) ».

[3] Étymologie per syllabas de Valmondois (val[or] et mond[ois]).

[4] estondee (mss. A B), mot inconnu par ailleurs ; effondee (ms. C) l’est également ; esmondee, suggéré dans le T.-L., n’est pas mieux attesté et n’est pas bien appelé par le sens. Il doit s’agir d’un verbe dont la signification s’accorde avec les deux images des v. 15 et 16.

[5] 17 et 19. ensele, selon le T.-L., signifierait ici (exemple unique) « asseoir sur le trône » : ce qui suppose un rattachement à selle (< sella). En réalité, il s’agit de celle (< cella) : « Que l’âme d’Ansel soit logée avec les saints, car Dieu qui loge ses amis, ... » Cf. le T.-L. lui-même, pour cele, terme de la langue religieuse, II, 93-94 ; et pour enceler, « Ou moustier ou au cloistre tous les doit encieller » (Cilles li Muisis, I, 182, où il s’agit de l’obligation de l’abbé à l’égard de moines) ; cf. Annal. Bened., p. 691, col. 2 : « Recepti, ad statutum terminum venientes, si prior absens fuerit…, nihilominus a conventu induantur et incellentur. »

[6] Sans doute : « Elle scelle, à destination de l’Isle, une lettre redoutable. »

[7] en, grammaticalement, peut renvoyer soit à lettres, soit à l’Isle. Dans le premier cas, il s’agirait, par développement de l’image du vers précédent, de la mort qui, ayant expédié une lettre scellée, en fait ensuite sauter le sceau pour faire connaître son ordre (mais osté n’est guère le terme qui conviendrait). Dans le second cas, le fort seel serait Ansel (mais l’image, qui s’ajuste mal à la précédente, est en elle-même peu naturelle).

[8] sa, de la mort.

[9] La leçon ne tent au de A (B manque) donnerait à la rigueur : « Nul ne tend la patte pour relever celui qui est tombé » : sens forcé, car lever n’est pas relever, et l’on ne tend pas la « patte » pour aider quelqu’un. C’est la leçon de C (n’atant a) qui est la bonne (« aucun [des servants] n’attend pour lever la griffe contre la victime ») : le vers explique le li corent seure du vers précédent ; poe est ainsi pris en son sens vrai ; et quant à celui de atendre a = « attendre pour, tarder à », cf. Huon de Bordeaux, v. 168 : « Tant atendi el palais a entrer que... »

[10] Cf. U 178. Le sujet est li serviz.

[11] mort, « la mort », sujet.

[12] Cf. AK 42. Pour ce procédé de numération, cf. Tobler, V. B., II, 147-148, et le T.-L., II, 3.

[13] qui = cui.

[14] La leçon Ne de A ne donne pas de sens adapté au contexte. Entendre : « Si j’ai jamais parlé en faveur de quelqu’un ». Pour l’expression, cf. Baudouin de Sebours, V, 167 « Qui un bien en diroit ».

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